Monsieur Nieluccio est propriétaire de vignes qu'il exploite dans la région de Saint Florent. Il produit notamment du vin rouge d'appellation Patrimonio sous la marque « a Filetta ». Pour faciliter la commercialisation de ce vin dans la région du grand ouest, il a conclu un contrat de distribution avec une enseigne de cave à vins, qui a une quarantaine de magasins disséminés entre Bayonne et Brest.
Aujourd'hui, préparant son départ à la retraite, il a trouvé acquéreur pour son exploitation. Ce dernier, Monsieur Vermentinu, est vivement intéressé par le réseau de distribution de Monsieur Nieluccio et souhaiterait s'assurer qu'il pourra continuer à en bénéficier une fois qu'il sera propriétaire.
Le contrat de distribution conclu par le vendeur n'est pas automatiquement transféré à l'acquéreur. En effet, la Cour de cassation estime que l'acheteur est un tiers à l'égard des obligations contractées par le vendeur relativement au bien cédé (Cass. req., 3 sept. 1940 : Sem. jur. 1940, II, 1557, note Becqué). Cette solution est conforme au principe de relativité des conventions et repose fondamentalement sur l'idée selon laquelle il est difficile de tenir pour engagée une personne qui n'a pas conclu la dette.
De plus, ce type de contrat est souvent conclu « intuitu personae », c'est-à-dire, que le contrat est conclu en considération de la personne cocontractante. Dans notre hypothèse, c'est d'autant plus vrai que l'enseigne accepte de distribuer le vin produit par Monsieur Nieluccio.
Néanmoins, ne connaissant pas les capacités du futur repreneur pour faire du vin d'aussi bonne qualité, le contrat de distribution contient certainement une clause interdisant le transfert dudit contrat en cas de cession de l'exploitant, sauf agrément exprès du distributeur.
Saisi d'une demande d'agrément, le distributeur aura alors l'obligation de l'examiner (code civil, art. 1134, al. 3).
D'autre part, à défaut de clause particulière dans le contrat de distribution autorisant la transmission, il conviendra de recueillir le consentement individuel de l'enseigne de cave à vins pour que notre acquéreur puisse continuer à vendre son vin sous la marque « a filetta » grâce à ce réseau (Cass. com., 6 mai 1997 : D. 1997, jurispr. p. 588, note Ch. H. et M. Billiau)
Afin de bien préparer sa future acquisition, Monsieur Vermentinu aura tout intérêt à consulter son notaire, et s'assurer préalablement de l'agrément du distributeur, surtout s'il s'agit d'une condition déterminante de l'acquisition envisagée. Le vendeur devra également être également vigilant aux engagements qui peuvent être stipulés et mis à sa charge aux termes du contrat de distribution en cas de cession.
AVRIL 2012 - Article rédigé par JURISVIN pour VITISPHERE