La société Pinot Noir, société civile d'exploitation, exploite une propriété viticole en Bourgogne, quelle loue au GFA Chardonnay. Afin de développer son activité, elle souhaiterait emprunter des fonds à la banque pour construire un nouveau chai. La banque, pour son accord, a demandé une garantie hypothécaire sur des immeubles appartenant aux associés ou à la société. La SCEA n'étant pas propriétaire, un des deux associés de la SCEA, qui est également associé gérant dans le GFA avec son conjoint, souhaiterait proposer que certains biens loués par le GFA soient donnés en garantie.
Néanmoins, il s'interroge sur la validité d'une telle pratique.
Aux termes de plusieurs arrêts (cf notamment Cass. 1ère civ., 8 novembre 2007 ; Cass. com., 8 novembre 2011 ; Cass. 3ème civ., 12 septembre 2012), la Cour de Cassation a énoncé les conditions aux termes desquelles un contrat de cautionnement peut être valablement donné pour garantir le prêt consenti à une autre société :
- l’objet social doit expressément prévoir la possibilité de conclure un cautionnement ou constitution d'hypothèque.
- il doit exister une communauté d’intérêts entre la société garante et la société cautionnée
- le cautionnement doit résulter du consentement unanime des associés de la société garante
- le cautionnement doit être conforme à l'intérêt social : il ne doit pas risquer de mettre en péril la société qui consent un cautionnement et il faut pouvoir démontrer l'existence d'une contrepartie)
Le juge estime en effet qu'il n'est pas nécessaire de remplir toutes les conditions mais il faut que la majorité d'entre elles soient réunies : dans ce cas, le cautionnement pourra a priori être valablement donné par le GFA.
Dans notre cas, il n’a pas été prévu dans l’objet social du GFA que ce dernier puisse conclure des cautionnements, n’ayant que pour objet l’acquisition, l’administration et la mise en location de ses biens à destination agricole.
Néanmoins, si tous les associés dudit GFA donnent unanimement leur accord au cautionnement, une des conditions sera alors remplie.
Qui plus est, s’agissant de cautionner le financement d’un chai sur les terres lui appartenant, le GFA en deviendra alors propriétaire dès la construction de cet immeuble, ou en fonction de ce qui est prévu dans le bail, aux termes dudit bail, ce qui a priori peut être considéré comme conforme à l’intérêt social puisque chaque société y trouvera son compte.
D'autre part, seuls certains biens seront donnés en garantie : la mise en péril de la société ne semble donc pas avérée.
Enfin, le gérant du GFA étant également associé dans la SCEA, il existe bien une communauté d’intérêt entre la société garantie et la société garante.
A priori, on peut donc considérer que le GFA pourra valablement garantir le prêt accordé à la SCEA, la majorité des conditions énoncées par la jurisprudence étant réunies.
Pour un conseil adapté, les associés auront donc tout intérêt à consulter leur notaire afin de préparer au mieux leur montage financier.
Avril 2013 - Article JURISVIN paru dans REUSSIR VIGNE